Le Béguinage Sainte-Anne transformé en pension de famille

Que faire du béguinage Sainte-Anne ? Durant plus d’une dizaine d’années, la question est demeurée sans réponse faute de financements suffisants pour réhabiliter cet ensemble de bâtiments implantés depuis la nuit des temps rue Michelet, en plein cœur de Saint-Quentin (lire ci-dessous). Jusqu’au jour où l’Etat a imaginé le dispositif Action Cœur de Ville qui, depuis 2018, vise à redynamiser le centre des villes de taille moyenne et valoriser le patrimoine urbain. « Ce dispositif s’est montré déterminant pour nous sur le plan du logement et de l’aménagement urbain », confirme Frédérique Macarez, le maire de Saint-Quentin. Un dispositif qui, dans le cas présent, a permis de sortir de l’impasse en mettant sur la table des aides financière conséquentes. Le coût global des travaux de réhabilitation du béguinage Sainte-Anne avoisine les 5 M€ et sera assumé pour l’essentiel par le propriétaire des lieux, en l’occurrence Partenord Habitat. Mais l’Etat va donc mettre la main à la poche à hauteur de 850 000 €, tandis que la Ville va dégager une enveloppe de 361 000 €.
L’objectif ? Transformer le béguinage, vidé de ses habitants depuis 2019, en pension de famille gérée par l’association Accueil & Promotion. Au total, 39 logements (de type T1 ou T1 bis), ainsi qu’un logement de fonction, vont être aménagés sur une surface de quelque 2 000 m2. A la manœuvre, l’agence Altanéo, dirigée par l’architecte saint-quentinois Valérian Plets. Après plusieurs phases de désamiantage, déplombage, curage et traitement d’un champignon, les travaux de rénovation vont débuter en janvier prochain. Durée du chantier : entre 16 et 18 mois pour une livraison prévue à l’automne 2025. « A Saint-Quentin, nous sommes très attachés à nos béguinages, rappelle Frédérique Macarez. Avec bon nombre de logements situés à l’étage, le béguinage Sainte-Anne n’était plus vraiment adapté aux personnes âgées. D’où l’intérêt de lui offrir une seconde vie en aménageant sur place une pension de famille. » Ce type de structure s’adresse en priorité à des personnes en difficulté et souvent seules. Chaque résident dispose de son propre logement et a accès à des espaces collectifs pour y partager des activités. « C’est être chez soi mais pas tout seul, note une représentante d’Accueil & Promotion. Pour accompagner les résidents, une assistante sociale et une animatrice sont présentes en permanence. Leur présence garantit aux résidents un soutien dans leurs démarches individuelles et l’organisation d’une vie collective. »
Nous voici ainsi dans un cadre de vie à taille humaine qui permet à celles et ceux avec qui la vie n’a pas toujours été tendre de mieux se reconstruire. Chaque résident doit naturellement s’acquitter d’une redevance mais nulle limitation de temps n’est imposée. C’est dire que certains finiront peut-être leurs jours dans cette pension devenue pour eux une nouvelle famille…

Un béguinage qui remonte au XIVe siècle !

– Au début du XIIIe siècle se développent en Flandre des communautés de béguines, femmes veuves ou célibataires, désirant vivre pieusement, mais sans prononcer de vœux. L’origine du nom béguine viendrait du nom d’un prêtre, Lambert le Bègue, fondateur vers 1170 d’une communauté de femmes laïques à Liège (Belgique).
– Comme à Douai, Valenciennes, Lille ou Cambrai, Saint-Quentin connaît un développement du mouvement béguinal dès le XIIIe siècle. Il se poursuit au-delà du Moyen Âge, au XVIe siècle, puis surtout dans les années 1840-1890, dans une ville alors en plein essor industriel. Au total, une vingtaine de sites sont ainsi fondés entre 1235 et 1936.
– En 1344, Gérard d’Esquéheries et son épouse fondent dans l’actuelle rue Michelet à Saint-Quentin un béguinage pour 13 femmes. La communauté d’Esquéheries, installée initialement dans la demeure du fondateur, prend le nom de béguinage Sainte-Anne après l’édification d’une chapelle dédiée à la sainte en 1570.
– Vétuste, le béguinage Sainte-Anne est entièrement reconstruit dans les années 1880, sous la forme de pavillons accolés mais aussi d’immeubles collectifs à deux niveaux.
– Les béguines revêtent une robe de couleur sombre et se coiffent d’un voile blanc, le béguin. Elles obéissent à une supérieure, elle-même placée sous le contrôle de la municipalité ou du chapitre de la Basilique. Veuves ou filles célibataires, âgées de 30 à 60 ans minimum, les béguines du Moyen Âge sont de condition sociale pauvre. Au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, les béguinages sont réservés seulement aux veuves et filles « de bons
et notables bourgeois ».
– Dans la première moitié du XXe siècle, il faut être âgé de 60 ans minimum, justifier d’une bonne réputation et avoir 20 ans de résidence à Saint-Quentin.
Source : Frédéric Pillet, direction du Patrimoine de Saint-Quentin.